L’administration fiscale finlandaise ne se contente pas de ses succès actuels. Elle prépare déjà l’avenir avec une vision ambitieuse baptisée « approche écosystémique ». Ce concept novateur a été présenté par Sami Koskinen, Director for Stakeholder Relations, lors d’une conférence organisée le 4 juin au siège de l’institution à Helsinki devant des journalistes africains.
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« La fiscalité devient essentiellement un écosystème d’écosystèmes qui sont axés sur certains domaines de la vie des individus et des entreprises », a expliqué M. Koskinen, utilisant une métaphore biologique pour décrire cette transformation profonde du rapport à l’impôt.
Un concept adapté à l’ère numérique
L’approche écosystémique répond aux défis posés par les mutations économiques contemporaines : économie de plateforme, actifs cryptographiques, nouvelles formes de travail et d’entrepreneuriat. Face à ces évolutions, l’administration fiscale finlandaise reconnaît avoir atteint les limites du système actuel de conformité volontaire.
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Le concept repose sur une idée simple, mais révolutionnaire : « identifier les événements quotidiens ou récurrents clés dans la vie des individus et des entreprises, puis regrouper l’ensemble des services publics et privés liés à ces événements ».
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Par exemple, lors d’un décès dans une famille, de nombreux fournisseurs de services, tant publics que privés, interviennent : services funéraires, banques, assurances, notaires, administrations diverses. L’approche écosystémique vise à coordonner ces interventions pour simplifier les démarches des citoyens dans ces moments difficiles.
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« Nous avons identifié une vingtaine d’événements de vie majeurs pour lesquels nous développons des écosystèmes spécifiques », a précisé Sami Koskinen. Ces événements incluent la naissance d’un enfant, l’achat d’un logement, la création d’une entreprise ou encore le départ à la retraite.
La standardisation des données au cœur du système
L’élément technique central de cette approche est la standardisation des données. L’objectif est que le contribuable n’ait à soumettre ses informations qu’une seule fois, ces données étant ensuite partagées entre les différents acteurs de l’écosystème, dans le strict respect des règles de confidentialité.
Cette standardisation concerne tant le contenu des données que leur format, permettant une interopérabilité entre les systèmes des différents fournisseurs de services. Un travail considérable de concertation est mené avec les acteurs publics et privés pour définir ces standards.
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« La standardisation des données est un défi technique, mais surtout un défi organisationnel et culturel », a souligné M. Koskinen. « Elle nécessite une collaboration étroite entre des entités qui n’ont pas l’habitude de travailler ensemble. »
Des bénéfices multiples
Pour les contribuables, les avantages sont évidents : simplification drastique des démarches administratives, réduction du temps consacré aux obligations fiscales, diminution des risques d’erreur et donc de redressement.
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« Notre vision à long terme est que la fiscalité se produit simplement en lien avec les événements quotidiens, de sorte que le contribuable n’a pas à trop s’en préoccuper », a affirmé Sami Koskinen. Dans cette perspective, l’impôt devient un processus quasi invisible, intégré de manière fluide dans les activités quotidiennes.
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Pour l’administration fiscale, les bénéfices sont également substantiels : amélioration de la qualité des données collectées, réduction des coûts de traitement, allocation plus efficiente des ressources humaines vers des tâches à haute valeur ajoutée.
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Cette approche répond aussi à une évolution des attentes des citoyens, habitués désormais à de simples services instantanés dans leur vie quotidienne. « Si les services fiscaux ne suivent pas cette tendance, le risque est que la fiscalité soit perçue comme trop complexe, décourageant ainsi la conformité volontaire », a averti le responsable finlandais.
Un déploiement progressif
Le déploiement de cette approche écosystémique se fait de manière progressive, avec des projets pilotes sur certains événements de vie spécifiques. Les premiers résultats sont encourageants, avec une satisfaction accrue des usagers et une amélioration de l’efficacité administrative.
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La Finlande collabore également avec d’autres pays nordiques et l’OCDE pour partager son expérience et contribuer à l’élaboration de standards internationaux. Cette coopération est particulièrement importante dans un contexte de mondialisation économique où les enjeux fiscaux dépassent souvent les frontières nationales.
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Les journalistes africains présents à la conférence ont manifesté un vif intérêt pour cette approche novatrice, tout en s’interrogeant sur les prérequis nécessaires à sa mise en Å“uvre. Sami Koskinen a reconnu que cette vision suppose un niveau élevé de digitalisation et une coordination efficace entre les différentes administrations.
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« Chaque pays doit trouver son propre chemin vers la modernisation fiscale, en fonction de son contexte spécifique », a-t-il conclu. « Mais les principes fondamentaux de simplification, d’intégration et d’orientation client sont universellement applicables. »
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Cette vision finlandaise de la fiscalité du futur pourrait bien inspirer des réformes dans de nombreux pays, à mesure que les administrations fiscales du monde entier cherchent à s’adapter aux transformations profondes de l’économie et de la société.
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