José Mujica, dit « Pepe », était devenu célèbre dans le monde entier pour son refus des conventions à l’époque où il dirigeait l’Uruguay  (2010-2015). Ce chantre de la frugalité, qui se disait « philosophiquement stoïcien », conduisait lui-même sa vieille Coccinelle et avait refusé de vivre dans la résidence présidentielle, préférant sa modeste ferme des environs de Montevideo. Il devait sa popularité à sa personnalité et à son verbe spontané, sans langue de bois et souvent polémique.
« La vie s’en va, c’est inévitable, mais les causes, elles, demeurent »
Promoteur de mesures progressistes pour l’Amérique latine, comme la légalisation du cannabis – une première mondiale en 2013 –, l’avortement et le mariage homosexuel, Pepe Mujica avait été surnommé reversait la quasi-totalité de ses revenus à un programme de logement social.
Mais dans le petit pays sud-américain de 3,4 millions d’habitants, ce président rond et moustachu a laissé une image plus contrastée. Ses résultats macroéconomiques ont suscité la critique : le pays a vu le déficit budgétaire s’alourdir et l’inflation grimper. Il a aussi laissé en héritage d’importants dossiers non résolus, comme la sécurité, l’amélioration des infrastructures, la santé ou l’éducation.
À l’inverse, ses partisans saluent une politique qui a permis de créer des emplois, une baisse des inégalités et une hausse du niveau des revenus.
Souffrant d’une maladie immunitaire, c’est la pandémie de coronavirus qui l’avait finalement « jeté dehors » et forcé à renoncer, en octobre 2020, à son unique mandat de sénateur, décroché en début d’année. « La seule chose permanente dans la vie, c’est le changement, avait-il dit lors de son discours de démission. La vie s’en va, c’est inévitable, mais les causes, elles, demeurent. »
« Le guerrier a droit à son repos »
Pepe Mujica fut, dans les années 1960, l’un des fondateurs de la guérilla d’extrême-gauche des Tupamaros. Blessé par balles en 1970, il fut emprisonné toute la durée de la dictature (1973-1985). Placé à l’isolement, il fut torturé.
S’il n’a jamais caché sa « sympathie » pour le défunt président vénézuélien Hugo Chavez (1999-2013), ancien chef de file de la gauche antilibérale latino-américaine, il se comparait plus volontiers au président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2011) et réélu en 2022.
L’ex-président était marié avec Lucia Topolansky, rencontrée dans « la lutte clandestine » avant l’avènement de la dictature. « Le plus grand succès de ma vie », dira-t-il de sa compagne de toujours. Sénatrice, elle fut de septembre 2017 à mars 2020 vice-présidente d’Uruguay. Lucia Topolansky et Pepe Mujica n’ont pas eu d’enfants.
Début janvier, dans l’une de ses dernières interviews, après avoir fait campagne à 89 ans pour le retour de la gauche au pouvoir avec l’élection de Yamadu Orsi, Pepe Mujica déclarait : « Mon cycle est terminé. Clairement, je suis en train de mourir. Le guerrier a droit à son repos. » Il a demandé à être enterré dans son jardin, sous un arbre qu’il a planté, aux côtés de sa chienne Manuela.
Lire l’article original ici.