Publié le 1 mai 2025
Lecture : 2 minutes.
Fichier généré le
Conformément à cette tendance qui consiste à valoriser les racines ancestrales pour donner quelque coup de polish aux dirigeants actuels au passage, le Mali vient de faire d’une pierre deux coups. Dans la localité de Moribila de la région de San vient d’être érigée une statue en hommage à un citoyen injustement ignoré par les moteurs de recherche occidentalisés. Si le patronyme de Gnimé Goïta rime avec celui du chef de la transition actuelle, nul ne semble vouloir nier un parfum népotique posthume. En 3 minutes et 14 secondes, le journal télévisé de la chaîne ORTM1 a tenu à rappeler quatre fois que l’honoré du jour n’était autre que… le grand-père d’Assimi Goïta.
Certes, avoir un descendant célèbre n’interdit pas de devenir célèbre soi-même, même post mortem. Quelques internautes s’étonnent tout de même du timing. « Pourquoi maintenant […] ? Si Assimi n’était pas président, jamais cette statue n’aurait vu le jour », s’interroge ainsi un commentateur d’un post Facebook sur le reportage de la télévision nationale. D’autres s’interrogent sur la justification de l’honneur fait à celui qui fut chef de canton sous l’administration coloniale française.
Internautes taquins
Plus deuxième degré, un internaute se demande si la cérémonie d’inauguration du monument ne relève pas « du phénomène de Stockholm », le syndrome évoqué faisant référence à l’empathie qui peut naître, chez une victime, à l’égard de son geôlier. Au troisième degré, un autre se fait plus grinçant : « Gnimé Goïta, l’exemple à suivre », comme celui « des autres chefs de canton qui ont bien servi la France ».
Tout en se réjouissant de l’immortalisation du « rôle historique » d’un « grand homme bâtisseur patriote », l’ORTM1 et les intervenants de ses micros-trottoirs n’éclaircissent guère davantage la lanterne des téléspectateurs. Celui qui n’était « pas un guerrier » faisait « les commissions entre le village et l’administration française » qui, selon un témoin, « était sur le point de partir ». Revenant au village après ses missions, Gnimé Goïta se serait « opposé » à ce qui contredisait les valeurs sociétales africaines. « Au prix du sang », selon une formule évasive de l’ORTM1.
Contextualisation opportune
La communication autour de l’inauguration de cette statue colle clairement au « cheval de bataille » de l’actuelle transition en quête d’ancrage socio-culturel. Une transition très incarnée individuellement et donc gourmande de valorisation familiale, comme quand des chefs d’État des années soixante-dix décrétaient fériés les jours de naissance de leurs géniteurs.
Le général Assimi Goïta est en passe de voir son premier quinquennat renouvelé, officiellement sur initiative d’une « concertation nationale« . Car le culte de la personnalité, qui revient en force sur tous les continents, gagne toujours à être présenté sous les traits d’une impulsion spontanée, qu’il s’agisse d’une statue en hommage à Gnimé Goïta ou d’un monument plus directement baptisé « Assimi Goïta », à Massigui, en 2022.
Lire l’article original ici.