• Damien Glez


    Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

Publié le 8 avril 2025

Lecture : 2 minutes.

Le discours souverainiste de l’actuel régime nigérien a le mérite de la cohérence et les trois pays frères de l’Alliance des États du Sahel (AES) partagent, eux aussi, la qualité de l’homogénéité si favorable à l’intégration. Ainsi les membres de la confédération suivent-ils des trajectoires à orientation identique, notamment sur les choix linguistiques, même si certaines langues sont communes et d’autres pas.

Par contre, si du côté burkinabè de la frontière, les autorités ont cantonné le français au statut de langue de travail, 15 mois avant de claquer la porte des instances de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), le Niger a déroulé le chronogramme dans un ordre légèrement différent.


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La récente publication au Journal officiel nigérien du décret de promulgation de la charte de la refondation grave dans le marbre les nouveaux choix en matière de langues reconnues. Fondée sur les recommandations des assises nationales de février, ladite charte a été entérinée, le 26 mars dernier, par Abdourahamane Tiani. Elle remplace ainsi la Constitution qui avait été suspendue, à l’occasion du coup d’État contre Mohamed Bazoum, en juillet 2023. L’article 12 du nouveau texte établit la hiérarchie des langues pratiquées dans le pays.

Plus de langue officielle

Alors que le français était la langue officielle, la charte de la refondation n’accorde désormais ce statut à aucune langue. La loi fondamentale du moment liste onze systèmes linguistiques officiellement parlés, recensement qui va du fulfulde au zarma-songhaï, en passant par le tassawaq ou le tamajaq. Mais seul le haoussa se voit distingué avec un statut de « langue nationale ».

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Aucun choix n’étant anodin, il peut se poser, dans ce genre de bouleversement linguistique institutionnel, des gageures logistiques. Certes, la rétrogradation du français cadre avec le refroidissement polaire des relations avec l’ancien pays colonisateur, dans une logique de néosouverainisme radical. Mais cette langue reste mentionnée dans la charte de la refondation, en tant que « langue de travail ».

Risque de communautarisme ?

Cette semi-rupture avec la langue de Molière peut s’expliquer de deux points de vue. Même si l’on veut expurger une langue « impérialiste », il est difficile de renouveler instantanément tous les supports administratifs rédigés dans l’ancienne langue officielle – à commencer par les billets de franc CFA –, surtout si la seule langue nationale ne fait pas l’objet de suffisamment d’avancées en matière d’alphabétisation.

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Se pose également la question du caractère plus ou moins commun d’une langue. Certes, contrairement à d’autres pays où la langue française était présentée comme « unificatrice », celle-ci ne serait réellement pratiquée que par 13% de la population du Niger.

Pourtant, même si le haoussa serait, lui, compris par une grande majorité de la population, les défenseurs des autres langues se désolent que leur vocabulaire et leur grammaire aient perdu le qualificatif de systèmes linguistiques « nationaux ». Et certains observateurs de dénoncer une hiérarchisation des langues de différentes communautés du Niger précédemment traitées avec égalité.


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